10/09/2014

Le vlog, et pourquoi pas ?

Récemment je repensais à tout ce que j'ai vécu cette année. De très bonnes choses, beaucoup de mauvaises choses, mais des expériences qui m'ont fait avancer dans ma vie. J'ai l'impression de mieux savoir qui je suis et comment tenir debout. Si cette année m'a apporté quelque chose, c'est une meilleure connaissance de moi-même et surtout de comment je fonctionne. J'ai l'impression de mieux savoir comment me gérer, et comment gérer mon quotidien. Je sors d'une très longue dépression, que j'ai traversé sans l'aide d'aucun professionnel, et je ne le conseillerais à personne. Mais aujourd'hui, j'ai grandi, et j'ai envie d'aller plus loin dans ma réconciliation progressive avec moi-même. J'ai envie de parler de moi, j'ai envie de parler de mes expériences, j'ai envie de partager mes passions. Et étrangement, je ne suis pas sûre d'avoir envie de le faire ici. Alors je me suis dit, pourquoi ne pas créer une chaîne Youtube ? L'idée fait son chemin, j'essaie d'ajuster mes ambitions à ce dont je me sens capable (ce qui est très difficile pour moi, bien qu'essentiel), tout doucement. J'apprends petit à petit à monter correctement une vidéo, je vous en reparlerai quand j'aurai un appartement à moi !

Gros bisous à tous, merci d'être là

03/08/2014

Un souvenir

Nous avons tous deux beaucoup bu, et nous voilà l'un en face de l'autre, dans un recoin de ce bar pierreux, crasseux. Nous ne sommes pas seuls mais c'est tout comme. Tes yeux brillent. Me trouves-tu belle, essaies-tu de te raisonner, imagines-tu tes lèvres sur ma nuque, tes mains sur ma taille ? Dans l'ambiance électrique je voudrais t'emmener au loin, te dire : chut, verrouiller mes mains dans ton dos, picorer ta bouche, picorer ton corps, me déclarer enfin. Tes pupilles se dilatent, regards encore. Mon cœur ne bat pas, mes oreilles n'entendent pas. J'observe juste tes lèvres, ton sourire narquois et étonné, et j'espère que tu te donnes simplement une contenance, que ta bouche ne se moque pas. Je me sens mal, je ne sais plus, je ne sais pas, ces sensations sont trop pour moi. Alors je me détourne, chancelante, ivre de tout. Je repars au milieu du bruit et des lumières, je brise la magie de cet instant déjà loin. Mais, si longtemps plus tard, j'en rêve encore parfois. Ça et frôler ta main dans le noir, sur la plage, t'abandonner la mienne, sentir que tu ne te détourneras pas.
Penses-tu parfois à moi, chinny boy ?

10/07/2014

Philosophe pour lycéens

Les débats sur les écrivains et les philosophes font souvent rage dans mon fil twitter, chacun défendant son champion et pourfendant son ennemi sans pitié. Parfois il en ressort des considérations intéressantes sur la littérature et la philosophie, le débat est utile et passionnant. Et puis parfois... Parfois il y a des débats sur Camus et sur Sartre.

Peut-être que je cherche les ennuis mais je me fais un devoir de toujours apporter de la nuance aux adorateurs publics de Camus. Je leur parle de ses positions plus que douteuses sur la guerre d'Algérie, de son refus de la critique et de sa philosophie à géométrie variable. Bon écrivain mais pas très honnête intellectuellement. Ce à quoi on m'objecte en général : "Sartre était pire". Outre le fait que je trouve ça assez faux (mais c'est mon avis), c'est un peu fourbe de se venger sur un autre écrivain quand on critique son héros. Mais bref, d'accord, disons que j'accorde à l'argument-Sartre le droit d'exister. S'en suit souvent un débat stérile sur l'impasse qu'est la philosophie de Sartre. C'est là qu'une élève de khâgne (aucune critique de ma part sur ce point, j'ai été khâgneuse) a déclaré que Sartre n'était qu'un "philosophe pour lycéens". Et je dois avouer que ça m'a profondément agacée.

Ça ne m'a pas agacée pour Sartre, chacun pense de lui ce qu'il veut et surtout ce qu'il estime pertinent. Ça m'a fait sortir de mes gonds parce que l'expression en elle-même est purement et simplement du mépris. Parce qu'on veut dire quoi quand on parle d'un philosophe qu'on n'aime pas comme d'un philosophe pour lycéens ? On veut dire que la philosophie accessible aux plus jeunes est de la mauvaise philosophie. On veut dire que ce qu'on aime quand on n'a pas fait d'études supérieures mérite d'être traité par le mépris. 
Et quel sens ça a pour vous, au fond ? Deux ans après le lycée, c'est déjà une période de votre vie que vous trouvez méprisable ? Vous vous trouviez particulièrement bêtes quand vous étiez au lycée, incapables de comprendre une philosophie de qualité ? Ou peut-être que vous avez déjà oublié qui vous étiez ? Pire, vous vous pensiez peut-être au-dessus de la masse de ces autres terminale L qui aiment Sartre, les imbéciles.

J'ai fait khâgne moi, monsieur, je ne m'embarrasse plus des philosophes du bas-peuple, je lis du Heidegger la tête en bas. Et peu importe que contrairement à Sartre, je n'aie pas majoré à l'agrégation, peu importe que je ne me sois pas passionné pour la phénoménologie au point de lire et comprendre tout Husserl dans le texte. Peu importe que je sois encore loin du niveau pour être prof dans le supérieur. Moi, je suis en position de cracher sur un philosophe qui a accompli mille fois plus que moi, et je dis qu'être un philosophe que les jeunes comprennent, C'EST MAL. Du haut de mon petit élitisme étriqué, je décide de qui a le droit de lire de la bonne philosophie, et de ce qu'est la bonne philosophie. Vous savez, celle qui n'est accessible qu'en ayant lu trois livres de jargon qui l'expliquent.

Pour le bien de tous, il faut arrêter définitivement cet élitisme qui, apparemment, va de pair avec l'âgisme. On n'est pas plus bête à 17 ans qu'à 45. Il serait temps de le reconnaître et d'arrêter de donner l'impression aux jeunes qu'ils n'ont rien à dire, aucune opinion pertinente à exprimer et aucune voix à apporter au débat, fût-il philosophique. C'est tout pour moi.




Edit : Apparemment Camus se fait aussi beaucoup traiter de "philosophe pour classes terminale". L'élitisme ne s'arrête jamais.

05/06/2014

J'aime

Je n'ai pas écrit ici depuis longtemps, pourtant j'écris presque quotidiennement. Un roman. Ca n'avance pas beaucoup, mais c'est un projet qui m'occupe l'esprit et les mains, et qui j'espère verra le jour.
Quoi qu'il en soit, j'ai lu un article sur le blog de la délicieuse MissBlemish. Une liste de "j'aime", un mélange intéressant de choses importantes et de ces éléments apparemment insignifiants qui font en fait le sel du quotidien. Et ça m'a rappelé une liste de ce genre que j'avais écrite au printemps de mon année de seconde, il y a précisément 5 ans (c'est fou ce que le temps passe vite). J'ai fouiné, je l'ai retrouvée dans les méandres de skyrock (ne me jugez pas), et la voici :


Regarder le ciel - lutter contre le vent - prendre la pluie de plein fouet - s'abandonner à l'averse - regarder la neige par la fenêtre - écouter tomber la pluie - regarder les éclairs en étant bien à l'abri - l'odeur du gondron mouillé - le soleil dans mes cheveux - courir juste comme ça dans mon allée - le crépuscule, juste après que le soleil se soit couché, quand le ciel est encore rosé - mordre dans un hamburger - manger la pastèque avec les pépins - flasher sur le titre d'un livre - et puis l'acheter - le dévorer - le conseiller - le prêter - en discuter avec ceux qui l'ont lu - l'odeur des pages des vieux livres de poche - jouer une scène de théâtre - colophaner mon archet en rêvassant - être étendue bras en croix sur mon lit en écoutant mon mp3 - bassiner les gens avec mon bonheur - être amoureuse - danser de façon merdique - sourire - parler par gestes - comprendre l'autre à demi-mot - faire l'imbécile sur des jeux pour enfants - me taire - me saoûler de paroles - couper le son quand quelqu'un me gueule dessus - partir dans des délires monumentaux - serrer mes amis dans mes bras - rire à en mourir - déployer mes bras comme des ailes - faire la funambule sur le bord des trottoirs - lire un livre pour la 2e fois ou plus et savourer les phrases - chanter n'importe où - manger un Arlequin - partager - faire un cadeau - essayer un vêtement - m'endormir - boire un diabolo-fraise - mettre ma robe jaune - regarder arriver l'été - écouter ma chanson préférée - dire des conneries - changer de regard sur les choses - ne plus avoir mal - m'asseoir dans l'herbe - me promener - manger en famille - faire de la corde à sauter - progresser - écrire - jouer de la contrebasse - rêver l'impossible - manger des cerises - cueillir les framboises et en manger la moitié - boire un chocolat chaud les yeux dans le vague - me rincer les cheveux - sauter les 4 ou 5 dernières marches des escaliers - en avoir marre d'être raisonnable - avoir de bonnes notes - faire les choses le mieux possible - marquer un but au hand - en arrêter un - sentir que les choses sont à leur place - mordre très fort dans une glace - regarder les vagues se briser sur les rochers - regarder le calme du lac - jouer à la belote - ou au kems - jouer avec ma soeur au badminton - être sur le point de rentrer sur scène - chanter à tue-tête en pleine campagne


C'est étrange de me retrouver nez à nez avec les goûts et les petits plaisirs de l'Eliane d'il y a 5 ans. En un sens je me retrouve en elle, mais elle n'est plus tout à fait moi, et c'est pour ça que j'ai décidé d'en refaire une (moins fournie et un peu plus détaillée), 5 ans plus tard, pour le plaisir de faire une liste, et par curiosité vis-à-vis de moi-même. Comme le dit si justement un très très très vieil ami anglais : ALLONS-Y !


J'aime l'odeur du thé, quand il infuse et que je ne peux pas encore le boire. L'anticipation de la première gorgée.
J'aime chanter, quand je suis seule et que personne ne peut m'entendre.
J'aime la fin de l'automne, quand je peux regarder la pluie tomber sur la ville, bien au chaud chez moi, assise en tailleur sous un plaid avec un gigantesque mug de thé.
J'aime les journées bien remplies, quand il me faut du café pour tenir le rythme et que je ne m'ennuie pas sans pour autant stresser.
J'aime ces moments d'inspiration soudaine, quand la vie afflue dans mon corps et qu'il faut absolument que j'écrive, là, maintenant.
J'aime me réveiller à ses côtés, ouvrir les yeux et savoir qu'il est là, à quelques centimètres de moi.
J'aime ces blagues si nulles que nous seuls pouvons en rire. J'aime m'échapper quand un jeu de mots est vraiment mauvais, courir en riant, et j'aime le moment où il me rattrape.
J'aime les fraises et tout ce qui est à la fraise. J'aime croquer dans une fraise en ayant oublié à quel point c'est bon. Cette sensation de première fois.
J'aime l'hiver, le froid, les vêtements chauds, les pulls moches. J'aime les écharpes et les bonnets, j'aime le givre, j'aime le vent quand il promet la neige.
J'aime marcher la nuit, sentir sur moi les gouttes de l'averse, entendre sa rumeur sur le goudron qui sent bon la pluie.
J'aime lire, jusqu'au vertige, à l'excès, plusieurs livres en même temps souvent. J'aime sentir les pages sous mes doigts, savourer les mots, l'odeur du papier neuf et celle du vieux. J'aime les couvertures des livres anglais, j'aime m'offrir des livres, y passer tous mes sous et voir mes étagères se remplir de ces amis qui ne me jugent jamais.
J'aime aller au restaurant, regarder la carte et hésiter. J'aime passer pour une adulte en terminant sur un café.
J'aime l'acidité, la grimace de la première gorgée de citronnade chaude, les chips anglaises au vinaigre. J'aime noyer mes tomates sous le vinaigre balsamique.
J'aime faire des choses répétitives, j'aime même m'ennuyer parfois. J'aime la routine rassurante, les tee-shirts préférés, les habitudes toutes douces.
J'aime la ville. Paris, Lyon, Nantes, je suis une citadine pour toujours.

10/02/2014

Saint-Valentin, romantisme et kebab à emporter

Vendredi, c'est la Saint-Valentin. Si vous me connaissez un peu, si vous me voyez pester sur twitter contre tout ce qui est bien calibré et entrave à la longue nos élans de spontanéité, vous devez vous douter que ce n'est pas une fête que j'affectionne particulièrement. J'aime l'idée de se rappeler qu'on s'aime par de petites attentions toutes simples. Je n'ai rien spécialement contre le fait de choisir un jour précis pour le faire. Après tout, c'est vrai, puisqu'on peut se dire JE T'AIME tous les jours, pourquoi pas aussi celui-là ? Quand on n'a pas le temps, on a si tôt fait de négliger ce qu'on croit acquis... Non, ce qui me gêne dans la Saint-Valentin, c'est son côté convenu et rose bonbon : elle véhicule un romantisme unique, le même pour tous, qui ne me ressemble pas (et je ne parlerai pas de capitalisme aujourd'hui même si je dois avouer que j'en meurs d'envie). 
Et je déplore que beaucoup de couples à qui ça ne convient pas se forcent à rentrer dans ce moule, non seulement un jour par an, mais aussi bien souvent pour tout ce qu'ils ont à fêter à deux. Alors aux gens qui, comme moi, ne veulent pas renoncer à la Saint-Valentin mais ne se reconnaissent pas dans l'imagerie collective du romantisme, je veux proposer autre chose que nuisettes, restaurants chics et lumières tamisées. Au fond, ce serait bête de se priver de ce burger dont vous avez tous les deux envie parce qu'il est socialement plus accepté de vous partager du tourteau. 

Mon romantisme à moi, c'est commander une pizza et la manger à moitié nu-e-s devant un film qu'on avait vraiment envie de voir ensemble. Se dire qu'on s'aime dans des moments inattendus. Se taquiner l'un l'autre à longueur de journée. Rentrer à la maison avec un paquet de ses bonbons préférés juste pour lui faire plaisir. Dessiner un sourire sur le miroir pour qu'il/elle le voie avec la buée de la douche. Se ménager du temps à deux. S'envoyer des photos débiles, juste comme ça. Trouver un nom drôle pour votre futur chat. 
C'est avoir écrit JE T'AIME en majuscule dans un article pour que la personne qu'on aime le lise comme un message personnel et sourie.

Je ne vois pas le romantisme comme autre chose qu'un large sourire, une lueur qu'on fait naître dans les yeux de celui ou celle qu'on aime, un élan de complicité, un éclat de rire surtout.
Mon romantisme à moi c'est un fou rire au milieu d'une bataille d'oreillers.


Quelle que soit votre conception du romantisme, l'important, c'est de vous sentir libres de la vivre. Alors je croise les doigts très fort pour qu'aucune Saint-Valentin, aucune conception prémâchée de ce que doit être un couple ne vous en empêche !






P.S : Bien sûr je n'ai aucun problème avec ceux et celles qui se sentent en accord avec la définition actuelle du romantisme, les chanceux ! Profitez-en d'autant plus ;)

30/01/2014

Tout casser

J'ai l'air d'une fille qui ne sait rien garder pour elle. Raconter ma vie à des inconnus ne me pose pas de problème. Que la moitié du globe connaisse mes secrets, c'est devenu plutôt naturel pour moi. Ça a toujours été comme ça et pourtant, rétrospectivement, je continue à en avoir honte. Je me souviens de cette fois en CP où j'avais exhibé à toute la classe le dessin que m'avait fait mon amoureux et je me sens toujours aussi mal quand j'y repense.
Paradoxalement, je suis quelqu'un de très secret, y compris pour moi-même. J'enferme à double-tour les émotions trop fortes, les crises et les angoisses. Je crois que j'essaie de me les cacher à moi-même. Je crois que je veux aussi que personne ne les voie, parce que je les ai déjà moi-même discréditées. Pas assez importantes pour en parler, pas de quoi fouetter un chat, et puis je risquerais de déranger.
Déranger, ma grande hantise. Je m'efface en permanence, j'essaie de me faire la plus petite possible pour qu'on ne me voie pas. Pour que ma présence ne constitue un problème pour personne. J'essaie de disparaître pour mieux m'intégrer, quelle ironie. Depuis toujours je ressens le besoin de côtoyer les personnes que j'admire et je m'aplatis comme une carpette pour me faire accepter. Même quand je commence à très bien connaître quelqu'un, j'ai tendance à gommer mes côtés négatifs de mon mieux, à ne pas montrer de faiblesses, à ne pas parler de mes problèmes. De manière générale, l'idée même d'être jugée par les autres me donne des sueurs froides, alors je ne m'affirme pas et je donne très peu d'indices sur qui je suis. Pour vous donner un exemple, l'an dernier je n'arrivais à travailler qu'en bibliothèque ou dans des cafés. Je n'osais pas aller en bibliothèque parce que mes amis auraient vu à quel point j'étais en retard dans mon travail. Et j'allais très peu souvent dans des cafés parce qu'il aurait fallu que je le cache à mon copain de l'époque. Pourquoi je lui cachais ce genre de choses ? Parce que je ne supportais pas le regard de commisération qu'il me lançait quand je lui avouais avoir dépensé mon argent de manière frivole. J'ai aussi essayé de lui cacher mon addiction pour le macdo et j'ai totalement arrêté d'acheter des livres. Oui, je me laisse écraser comme une toute petite fourmi, tout le temps. En espérant être sauvée du désamour et de l'indifférence grâce à mon respect de la conformité.

Sauf que je ne suis PAS conforme. Je suis pansexuelle, je saute d'une conversation à une autre sans qu'il y ait de rapport apparent entre les deux (il y en a un, mais il se trouve cinq associations d'idées plus loin), je parle lentement, j'ai un corps en bouteille d'Orangina, quand j'étais petite je voulais être vendeuse d'oignons au marché, je sais ce que tout le monde pense à cause de détails mais je n'arrive pas à ressentir ce qu'ils ressentent, les gens commencent en général à me retracer l'histoire de leur vie et de leurs problèmes alors qu'on se connaît depuis cinq minutes. J'ai un nombre de tics corporels conséquent, je mange tout le temps parce que l'activité régulière de mes mâchoires me rassure, je m'absorbe tellement dans ce que je fais que j'oublie tout ce qu'il y a autour, je peux me déconnecter du monde réel pendant plusieurs minutes sans même m'en rendre compte, être tout à coup incapable de parler et m'enfoncer dans le mutisme pour des heures parfois... 
La malveillance me désarme et je suis incapable de lutter contre elle, j'ai l'impression de découvrir mes défauts à chaque fois que j'en fais l'expérience dans la vie réelle, je traverse de très longues périodes d'apathie où je me sens incapable de faire quoi que ce soit, je me sens intensément coupable de chaque erreur que je fais, je procrastine mais je n'assume pas, je passe la moitié de mon temps à faire l'autruche, je suis une grande sentimentale mais je jette les objets du passé sans le moindre remord, j'ai toutes sortes de manies, j'écris le roman de ma vie dans ma tête à la troisième personne quand je me rends compte que je suis en train d'envisager ma vie sous un angle intéressant ; même mes orgasmes sont bizarres. J'ai beaucoup d'orgueil et peu d'amour-propre, beaucoup d'ambition et horreur de me servir des autres pour avancer. Je ne peux pas en vouloir longtemps à quelqu'un, je suis incapable de retirer ma confiance à qui que ce soit. Je fais confiance aux gens consciemment même si je sais qu'ils vont me trahir. J'ai besoin de faire confiance. J'établis des systèmes et des logiques complexes dans ma tête pour à peu près toutes mes actions (y compris les plus inutiles), je manipule les gens à l'aide de mes sentiments sans même m'en rendre compte, je me cache pour ne pas déranger et pourtant je voudrais qu'on me remarque.

Tout ça pour vous dire que d'habitude j'implose, je désespère, je pleure, mais je garde tout à l'intérieur. Aujourd'hui je me sentais prête à exploser, et j'ai voulu que cette explosion soit une explosion de mots. Non, je ne suis pas normale. Ça n'est pas toujours facile de se sentir un tout petit peu en décalage avec tout le monde, tout le temps. Jamais vraiment en dehors mais jamais à l'intérieur non plus. J'ai l'impression d'avoir poussé comme une herbe folle, hors de tout cadre social. J'ai été violemment moi-même depuis la maternelle. Et puis j'ai compris que ce n'était pas ce qu'on attendait de moi. J'ai compris petit à petit ce qu'il en coûtait, et j'ai frénétiquement essayé de gommer tout ce qui en moi dépassait du cadre. Même ma voix quand je parle n'est plus que l'ombre de ce qu'elle est censée être : je me suis forcée à la rendre grave parce qu'on se moquait de moi à l'école. Je vous le donne en mille : les moqueries n'ont pas cessé quand ma voix est devenue normale. 
J'ai mis beaucoup trop de temps à comprendre que ceux qui se moquent de toi ne veulent pas que tu changes, que tu te conformes. Ils veulent juste se moquer de toi, rien ne sera jamais suffisant pour eux. Alors ce soir je suis en colère. Je suis en colère parce que j'ai souffert de ne pas être conforme, je suis en colère parce que sans la richesse de mes activités extra-scolaires et le foisonnement de ma vie intérieure, j'aurais coulé. Je suis en colère parce que tout ce que j'ai gommé, je suis seulement maintenant en train de le retrouver doucement et fastidieusement, et que je ne me sentirai bien dans ma peau que quand je saurai à quoi elle ressemble vraiment, ma peau. Pour l'instant ça fait mal. J'aurais tellement voulu n'en faire qu'à ma tête et continuer à être violemment moi-même, au lieu d'être geignarde et pathétique. Mais j'ai besoin d'en parler aujourd'hui, j'ai besoin que tout sorte enfin, je vous demande donc juste un peu d'indulgence. Ah, et le nom d'un bon psy !






Si vous en ressentez le besoin, vous pouvez partager votre expérience personnelle dans les commentaires.

25/01/2014

L'angoisse


Quelques années auparavant. Adolescence, certitudes, confiance. Je viens de commencer une histoire d'amour que je me figure éternelle. Je me récrie en face du gouffre béant de l'angoisse. Une rage de bonheur me submerge le corps, et je me vante très fort en souriant devant cette crevasse laide et venteuse. Persuadée de ne pas être à sa portée. Comme si j'avais déjà oublié la peur du vide qui enfermait ma cage thoracique sous clef les années précédentes.
Les choses avancent, l'angoisse me tenaille par moments. Coups de canif dans mon bonheur bien tranquille. Je m'y suis enfermée, j'ai laissé qui je suis devenir le jouet des manques et des peurs de mon prochain le plus cher. Ce que je ressens semble une insulte à la conscience qui me fait face, et qui voudrait que je me glisse sans remous dans un rôle subalterne et sans brillance. Je perds le goût de tout, je suis médiocre dans tout ce que j'entreprends, je ne brûle plus pour rien ni pour personne, et je ne vis plus que pour d'inutiles distractions. Je lance de vagues œillades à l'un de mes camarades mais je ne m'échappe pas du nid de mes amours toxiques. Une boule d'émotions refoulées au creux de mon estomac me courbe le dos en permanence, je n'écris plus, je me perds. Je regarde la faille avec une peur mêlée de respect et j'attends. Petite chose fragile incapable de décider seule.
Je voudrais être libre à nouveau, mais j'ai peur. Je recommence à tenter d'exister face à la singularité dont un jour j'ai cru être l'égale, et qui a refusé de ne pas être dominante. Je tourne le dos à l'angoisse en espérant qu'aucune créature n'émergera du gouffre pour me mordre ou m'emmener. Je n'ai rien perdu de mon apathie, mais deux semaines de solitude m'aident à former un début de réflexion. J'hésite entre le bonheur faux et une liberté ternie de solitude.
L'été m'assomme, l'angoisse m'envahit tout entière. Je reste seule dans le noir pendant des heures, à verser des larmes sans source. Je cherche en vain une direction à prendre. Quelques coups de poignard odieux et de la mauvaise foi m'inclinent vers une route qui me fait encore trop peur pour que je m'y engage, mais le gouffre près de moi ne m'inspire plus rien d'autre qu'une méfiance instinctive. Je sens la fin de mon supplice approcher, mais j'en ignore l'issue. J'avance à l'aveuglette.
Et soudain cette vague de confiance, cette envie d'oublier toute prudence et toute peur. Je me coule hors d'une cage dont quelques jours plus tôt, j'ignorais encore l'existence. Je ne suis pas tout à fait guérie. J'ai encore mal, je suis encore suffoquée par moments. Des vertiges de solitude me font perdre l'équilibre, parfois. Mais j'accueille dans ma vie, avec émerveillement, l'amour, la tendresse, le plaisir et le rire. Je retrouve ma faim d'apprendre et ma rage de bonheur. Je me perds dans la contemplation de cet homme qui n'attend pas de moi que je comble ses manques, et dont je n'attends rien d'autre que de l'amour et du respect. Je n'en finis pas de m'étonner de vivre quelque chose d'aussi intense et sécurisant à la fois. Je n'en finis pas de chavirer à chaque baiser. Je n'arrive toujours pas à croire à ma chance. A nouveau, je me tourne vers l'avenir, avec un mélange d'optimisme et de peur.
Je ne veux plus défier le gouffre béant de l'angoisse, et je ne veux pas l'ignorer non plus. Je sais quand la crise n'est pas loin, je sais quand les larmes montent, et pourquoi. L'angoisse est toujours là, dans mon ventre, à attendre son heure. Je ne la vaincrai jamais, et je n'essaierai même pas. Car elle est à l'origine de toutes mes faims, de toutes mes soifs. Elle est à l'origine de toutes les lettres que je trace ou que je tape. Elle est à l'origine de mes plus belles réalisations, de mes plus grandes émotions. Et tant qu'elle sera là, je continuerai à avancer, optimiste et acharnée, devant l'opiniâtreté mesquine de la vie.

06/01/2014

De la représentation LGBT

Hier sur twitter, j'ai lancé l'idée d'un dessin animé avec une héroïne lesbienne. Ou bie. On m'a à peu près répondu : "euh mais on s'en fout de l'orientation sexuelle du perso lol". J'aimerais bien qu'on puisse s'en foutre. J'aimerais vraiment bien. Mais tant que les personnes LGBT ne sont pas visibles, leur représentation dans la culture mainstream est importante. Elle est même politique.
En tant que pansexuelle, je fais partie des personnes sous-représentées dans les films, dans les livres, dans les chansons, dans les BD, à la télévision... Je trouve un peu plus facilement mon bonheur dans les séries, mais ce n'est pas encore la joie non plus, surtout si on parle des séries américaines bien polies, bien calibrées... en gros celles qui sont les plus vues. Même lorsqu'un personnage est bi ou pan, il m'arrive d'être déçue voire triste de ce qu'on en fait. Ce sont souvent des personnages d'arrière-plan (vous savez, ce mec bi dans Mad Men, dont tout le monde oublie le nom), ou dont on présente la sexualité de manière grossière et caricaturale, comme c'est le cas pour Brittany dans Glee par exemple. Donc c'est vrai, même si sur certains plans les choses avancent (Torchwood et Orange Is The New Black représentent de grandes avancées), je me sens encore mal représentée. Il n'y a pas et n'y aura probablement jamais dans les films la même proportion de personnes non hétéros que dans "la vraie vie". C'est la même chose pour les personnes racisées, les personnes handicapées, les personnes grosses, etc.
Et quand j'ai poussé ce coup de gueule hier sur le résal (un résal, des réseaux), plusieurs personnes hétéros m'ont demandé : En quoi c'est un problème ? Tu voudrais quoi, qu'on fasse un pourcentage ? Pourquoi tu ressens le besoin d'être représentée ? C'est pas surtout un caprice ?
Je ne veux pas qu'on compte les persos LGBTAIQ dans la culture mainstream. Ou plutôt : je voudrais qu'il n'y ait pas besoin de compter. Mais on vit dans une société où on est hétéro par défaut. Un scénariste peut très bien, en toute bonne foi (et c'est ce qui est triste), ne pas insérer de personnage non hétéro dans son histoire. Parce que quand il n'y a pas 2 personnes de même sexe qui s'embrassent devant son nez, son monde lui-même est hétéro par défaut. Et c'est un problème parce que, encore plus quand on n'est ni hétéro ni homo, on est effacé. Le cinéma se rappelle de notre sexualité quand il veut représenter un type instable (le rôle de Javier Bardem dans Skyfall) ou en transition vers une orientation "durable". Alors tant qu'on ne peut pas faire autrement, oui, on va peut être être obligé de compter. Même si ça me rend vraiment amère qu'on en soit réduit à ça.
Je ne sais pas comment vous expliquer à quel point ça m'a peinée qu'on me demande pourquoi je TENAIS à être représentée. A quel point je me suis rendu compte que vous n'aviez absolument AUCUNE idée de ce que ça fait de ne pas faire partie du groupe dominant. Evidemment que vous n'avez pas besoin de vous sentir représentés, vous avez l'embarras du choix, vous ne vous rendez plus compte que c'est un luxe que tout le monde n'a pas. C'est quelque chose que vous ne remarquez pas, qui ne vous semble pas fondamental, parce que vous l'avez toujours eu. 
Mais moi, j'ai vécu mon enfance à ne pas savoir qu'on pouvait être attiré par les garçons ET les filles. J'ai passé mon adolescence à penser que c'était rare et que c'était "un truc d'Emos pour avoir l'air dark". Il a fallu que j'attende mes 18 ans pour me rendre compte que je n'étais pas hétéro. Mes 19 ans pour prendre connaissance de l'étiquette "pansexuelle" et me l'approprier. Entre ces deux moments, tout une année à fouiner sur internet, à suivre de nouvelles personnes intéressantes sur twitter. Quand on est hétéro, on n'a pas besoin de faire ça pour savoir ce qui est différent chez soi, pourquoi on est légèrement à côté de la plaque tout le temps. Alors oui, quand j'étais petite j'aurais aimé voir des gens bis à la télé, dans les films que j'allais voir, dans les livres que je lisais par dizaines. J'aurais aimé savoir que j'étais normale. J'aurais aimé pouvoir me sentir libre de tomber amoureuse d'une fille. J'aurais aimé me rendre compte que la fille avec qui je jouais à Pokémon toute la journée en primaire était mon amoureuse et pas ma meilleure amie. Et être représentée m'aurait offert le luxe de savoir que quelque part dans le monde, des gens étaient comme moi. J'aurais eu conscience de cette partie de mon identité beaucoup plus tôt. 
Alors oui, maintenant que j'ai grandi, c'est moins grave. Mais je pense à ces gamins et ces gamines qui sont comme moi à leur âge, à qui on n'a rien expliqué, qui sauront si tard qu'ils et elles ont perdu du temps à se croire tout bonnement hétéro. Qui regretteront leurs quelques années perdues. Et je me dis qu'eux ont besoin de cette représentation LGBTAIQ pour se sentir moins paumés (et ça veut dire des personnages dont le trait de caractère principal n'est pas "il est gay lol"). 
Ce n'est pas si difficile, si ?